Blandin & Delloye, ou comment bien faire ses débuts dans la demi-mesure

Léon LUCHART
19/1/2024
Blandin & Delloye, ou comment bien faire ses débuts dans la demi-mesure

Chers lecteurs,

Vous le savez, le marché du « sur-mesure » est extrêmement fourni, à tel point qu’il se révèle parfois difficile à comprendre. Les offres diverses et variées y fleurissent depuis des années, et le client qui souhaite aujourd’hui se lancer dans la confection d’un ou deux costumes sur-mesure ne saura sans doute pas immédiatement par où commencer.

Dans ce domaine, il y a pourtant un nom français qui se distingue particulièrement : Blandin & Delloye. Déjà, par son implantation : la marque possède 15 salons en France, et 3 à l’étranger. Ensuite, par son prix plus qu’attractif. Enfin, par la qualité et la souplesse de son offre – car vous aurez l’occasion de le constater dans cet article, il vous y est possible de personnaliser à peu près tous les aspects du costume.

L’histoire derrière la fondation de B&D vaut le détour, mais je n’y reviendrai pas dans cet article : Hugo a pris le temps de la retracer avec ses fondateurs, Charles Blandin et Cédric Fourny Delloye, dans une vidéo des Discussions Sartoriales tournée à l’occasion des 10 ans de la marque. Je vous en recommande vivement le visionnage.  

Je vous propose donc plutôt que nous nous concentrions de notre côté sur un point qui suscite beaucoup d’intérêt dans notre audience : la description d’un rendez-vous type au sein d’un salon de demi-mesure.

SE JETER A L’EAU

Avant de commencer à m’intéresser à la chose sartoriale il y a plusieurs années, je ne connaissais rien au monde des tailleurs, et soupçonnais à peine que j’entrerais un jour dans ce genre de lieu – que j’aurais volontiers imaginé poussiéreux et désert. La réalité est bien différente, et je ne suis pas le premier à le dire : à l’heure où des achats en tous genres nous poussent souvent vers des boutiques bondées où l’expérience client est impersonnelle et angoissante, le salon d’un tailleur se présente comme un contre-modèle formidable. Ici, vous êtes reçu sur rendez-vous, et l’on ne s’occupe que d’une personne à la fois. Ici, vous découvrirez le plaisir de concevoir entièrement votre commande – ce qui fait un choc quand on a été habitué pendant des années à choisir parmi les articles encore à notre taille, suspendus dans un rayon de magasin. Ici, vous redécouvrirez les notions de temps, de patience, de discussion et évidemment, de plaisir.

L’expérience tailleur vous changera : même si vous ne vous intéressez au costume qu’en raison d’un mariage prochain, ou d’une occasion professionnelle, il est fort à parier que votre première commande vous donnera envie de faire évoluer doucement votre style vestimentaire.

Quant à l’intimidation que l’on peut ressentir lors d’un premier rendez-vous chez le tailleur, je me dois de préciser qu’elle peut être compensée en préparant soigneusement ce moment. Je ne peux effectivement que vous encourager à vous renseigner en amont, et à faire une liste des idées que vous aimeriez soumettre au conseiller qui se chargera de vous en salon. Pour ma part, l’aventure B&D a commencé au sein de l’une des boutiques parisiennes, rue de Tocqueville.

Concernant ma commande, j’avais une idée assez précise en tête : je convoitais un costume deux pièces, dans un tissu marron au motif léger. Comment en étais-je arrivé là ? Tout simplement en parcourant le contenu déjà existant de ma garde-robe : avec des souliers essentiellement marrons, et des chemises ou pantalons bleus, beiges et camels, il était assez intuitif d’opter pour cette couleur. Evidemment, un bleu ou un gris auraient tout aussi bien fait l’affaire – tout dépend de la raison pour laquelle vous venez en boutique.

On m’a d’abord présenté les liasses (c’est-à-dire les échantillons de tissus, classés et organisés pour que l’on puisse aisément les feuilleter) avec lesquels la maison a l’habitude de travailler, puis les liasses de drapiers. C’est sans aucun doute le moment le plus grisant : vous voyez passer entre vos mains des dizaines de propositions, à partir desquelles vous devez essayer de vous projeter. L’exercice est intellectuellement difficile au début, mais les conseils que vous recevrez sur place sauront vous aiguiller. Ayez quelques éléments à l'esprit : le teint de votre peau déjà (j’évite pour ma part les tissus trop clairs, ayant un visage d’ordinaire plutôt pâle), mais aussi la complexité des motifs. Ici, la chose est affaire de goût et d’assurance.

De mon côté, j’ai trouvé satisfaction : un marron au motif léger dans la liasse Krono de la maison Dormeuil, qui correspondait bien à ce que je cherchais. Toute la force de ce tissu repose à mes yeux dans la discrétion et la finesse du motif. Je voulais éviter un Prince de Galles trop voyant, sans aller pour autant vers de l’uni.

Voilà pour le choix du tissu. Restent encore de nombreuses étapes.

METRE RUBAN ET CIE

A présent, le conseiller ouvre son ordinateur, et remplit les informations demandées par l’atelier, qui sera en charge de la confection. Et ici, je dois bien reconnaître avoir été agréablement surpris par la précision et la souplesse du logiciel utilisé. La grande force de B&D est en effet de proposer un éventail de possibilités très poussé, qui touche aussi bien à des questions fondamentales de silhouette qu'à la configuration d’options plus superficielles.

Sans aucune surprise, vous pourrez ainsi jouer sur le type de veste (droite, croisée), la construction de l’épaulette et l’épaisseur de la tête de manche, le nombre de boutons, la forme des poches ; mais vous pourrez également personnaliser la largeur de ces mêmes revers, la hauteur et le positionnement de ces mêmes boutons, l’inclinaison de ces mêmes poches. Votre commande prendra ainsi forme au fur et à mesure des questions posées par le conseiller – et comme je le disais, tout y passera, du plus important au plus accessoire : montage de la veste, construction de la doublure, taille des rabats de poche, présence d’une signature, feutre du col etc. Le pantalon a droit au même traitement. Vous serez libre d’opter pour une ceinture sartoriale ou non, de choisir des pinces, des revers (et même un ardillon).

L'autre grand moment d’un rendez-vous chez le tailleur, vous vous en doutez, c’est la prise de mesures, qui doit servir à établir votre patronage. L’expertise B&D, en termes de compréhension de la physionomie, donne confiance. Vous verrez le conseiller faire plusieurs aller-retour pour ajuster vos relevés anatomiques, et s’assurer qu’aucun détail n'est laissé au hasard. Cette étape est complétée par l’essayage de vêtements-type qui permettent de bien cerner les spécificités de votre posture.

RECEPTION ET RENDU FINAL

Une fois confectionné, généralement en quelques semaines, le costume est livré en boutique, afin que le client puisse procéder à l’essayage final, auquel s’ajoutent souvent quelques légères retouches.

J’ai été charmé par le résultat. J’avais opté pour un costume plutôt sérieux : côté veste, une construction entièrement entoilée, des poches à rabat (avec poche ticket), des revers généreux, une ligne d’épaule extrêmement structurée ; côté pantalon, le choix résolument sartorial d’une ceinture à boutonnage décalé, taille haute, avec pattes de serrage, doubles pinces et revers de 5 cm. Notez quelques détails sur la veste : j’ai fait remonter à dessein la hauteur des boutons, et ai demandé un revers courbe afin de m’approcher d’une allure vintage.

Comme je le disais, quelques retouches sont souvent à prévoir : après avoir testé votre costume, dans la plupart des cas, il faudra accepter de le voir repartir pour une petite semaine d’ultimes modifications, avant la livraison définitive. Cette étape est certes frustrante, mais je vous déconseille de passer outre : une garde-robe se construira de toute façon avec de la patience. Dans mon cas, les retouches ont permis de corriger une légère asymétrie dans la longueur des bras (qui impactait le rendu de la manche), de relâcher légèrement le cintrage à l’arrière de la veste, d’ajuster encore un peu la ceinture et le bas du pantalon : quitte à aller dans le monde du sur-mesure, autant aller jusqu’au bout.

DU COTE DE L’OUTERWEAR

Blandin & Delloye est né dans un contexte actuel ; ainsi, la marque grandit avec les technologies qui ont contribué à moderniser l’art tailleur et à permettre l’existence de la demi-mesure telle que nous la connaissons aujourd’hui. Il semblera donc logique que la marque se positionne également sur des produits moins directement sartoriaux : peu consommateur de doudounes ou de workjackets, je me suis néanmoins laissé séduire par le trench de la maison, que vous pouvez découvrir ici en photos.

Cela faisait longtemps que je réfléchissais à acquérir un imperméable, mais ne voulais pas me risquer à le prendre en prêt-à-porter, au vu des difficultés que j’ai à y trouver satisfaction en termes de morphologie.

Si cette pièce vous intéresse, vous aurez naturellement la possibilité de choisir le tissu (dans mon cas, un mélange coton/polyamide vert), ainsi que quelques options de finition : boutons, doublure, signature. Nous avons ici opté pour une coupe un peu plus ajustée que la normale, ainsi que pour une longueur généreuse.

QUELQUES REMARQUES

B&D est une marque de confiance, qui s’adressera aussi bien à un public débutant qu’expérimenté. Si, évidemment, beaucoup de clients se rendent dans les salons de la marque pour un mariage, nous savons également que de nombreux amateurs du style sartorial lui sont fidèles. A cela, une raison principale : une souplesse de personnalisation et de confection extrêmement concurrentielle en regard des standards du marché. Sur les costumes, la marque affiche en effet une fourchette de prix impressionnante - comptez entre 600 et 900 euros pour un costume deux pièces, en fonction du tissu et des options que vous choisirez.

Nous vous laissons de notre côté avec quelques photos ; à la semaine prochaine chers lecteurs !

https://www.blandindelloye.com/